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14 DÉCEMBRE - 10 jours avant Noël
Le silence était la chose la plus étrange. Dans le cocon de sa chambre, Léo n’entendait plus les chants de Noël qui s’échappaient des fenêtres des voisins, ni le bourdonnement lointain de la circulation du centre-ville. Depuis la course-poursuite à la patinoire, il avait l’impression que chaque son était une menace potentielle.
« Analyse des schémas de patinage des ‘Casse-Noisettes’ terminée », déclara N.O.I.S.E.T. depuis le bureau de Léo. Son œil robotique bleu projetait des diagrammes complexes sur le mur. « Conclusion : leur technique est brutale mais efficace. Votre taux de survie en cas de nouvelle confrontation directe est estimé à 42.6%. »
« Super, merci pour le boost de confiance », marmonna Léo, allongé sur son lit, fixant le plafond. Le mépris dans le regard du Dr. Givre lui revenait sans cesse. Il ne l’avait pas pris au sérieux, mais il avait quand même envoyé ses sbires. C’était un avertissement. Un jeu du chat et de la souris.
« Léo ! À table ! » appela sa mère depuis le rez-de-chaussée.
Léo soupira et glissa N.O.I.S.E.T. dans son sac à dos avant de descendre. Le dîner était tendu. Ses parents sentaient bien que quelque chose n’allait pas. Ses notes chutaient légèrement, il était constamment distrait et semblait toujours fatigué.
« Tout va bien au collège, chéri ? », demanda son père, en servant de la purée.
« Oui, oui, nickel », répondit Léo, piquant mollement dans son assiette. Ses pensées étaient ailleurs, sur les toits enneigés de Mont-Sapin, à la recherche d’indices.
C’est à ce moment précis que ça arriva. La lumière de la cuisine clignota une fois. Puis une seconde fois, plus violemment. Le sapin de Noël dans le salon, brillant de mille feux, grésilla et s’éteignit brusquement. Une seconde plus tard, ce fut le tour de toutes les lumières de la maison. Dehors, un silence de mort s’installa.
« Oh, une panne de courant », dit sa mère en cherchant des bougies dans un tiroir.
Mais Léo savait que ce n’était pas une simple panne. Il se précipita vers la fenêtre du salon. Ce qu’il vit lui glaça le sang. La ville de Mont-Sapin, habituellement une mer de lumières festives et chaleureuses, était plongée dans une obscurité presque totale. Les guirlandes des rues, les vitrines des magasins, les lumières des appartements… tout avait disparu. La seule lueur provenait de la lune qui se reflétait sur le manteau de neige immaculé.
« Léo, reste ici, c’est peut-être dangereux », dit son père, inquiet par l’ampleur du black-out.
« Je… je monte juste chercher une lampe de poche ! », cria Léo en courant vers sa chambre.
Une fois la porte fermée, il sortit N.O.I.S.E.T. de son sac. L’œil du robot-lutin balayait la pièce, ses capteurs en alerte maximale.
« Ce n’est pas une panne de courant standard », confirma N.O.I.S.E.T., sa voix tendue. « Les relevés sont anormaux. L’énergie n’a pas été coupée. Elle a été… aspirée. Siphonnée à une vitesse phénoménale. »
Léo retourna à sa fenêtre, le cœur battant. Son regard fut attiré par une faible pulsation au loin. À l’horizon, la silhouette de la vieille tour de l’horloge se découpait sur le ciel nocturne. Et à son sommet, une très légère lueur verdâtre pulsait à un rythme lent et sinistre, comme un cœur malade.
« La tour de l’horloge », souffla Léo.
« Détection d’une concentration énergétique colossale à ces coordonnées exactes », rapporta N.O.I.S.E.T. « Agent Léo, je crois comprendre. Le Dr. Givre ne se contente pas de pirater des systèmes. Il absorbe l’énergie. Mais pas n’importe laquelle. Il a créé une machine qui se nourrit de… l’esprit de Noël. »
La théorie était folle, mais elle expliquait tout. La joie, la chaleur, l’effervescence collective de la ville à l’approche des fêtes… tout cela générait une forme d’énergie positive que Givre avait trouvé le moyen de récolter.
« Les lumières ne sont qu’un dommage collatéral », conclut Léo, horrifié. « Il draine la joie de la ville pour alimenter ses plans. »
C’était un test. Un premier essai à grande échelle. Et ça avait fonctionné. Mont-Sapin était à genoux, privée de lumière et de chaleur. L’esprit de Noël, littéralement, venait d’être volé.
Depuis sa chambre, Léo se sentit impuissant. Il ne pouvait rien faire, coincé dans cette obscurité avec ses parents qui frappaient doucement à sa porte. Mais sa mission venait de prendre une nouvelle dimension. Il ne s’agissait plus seulement de sauver le traîneau du Père Noël. Il fallait sauver la ville elle-même. Et il savait désormais où frapper.
