20 DÉCEMBRE - 4 jours avant Noël

Le sol de sa chambre semblait encore vibrer du passage de son père. Léo n’avait pas dormi, rejouant en boucle la scène du petit matin. L’étau se resserrait. Comment pourrait-il mener l’assaut final sur la tour de l’horloge s’il ne pouvait même plus sortir de sa chambre sans risquer de croiser un de ses parents ?

« La reconnaissance d’hier soir était un succès, mais votre quasi-détection est inacceptable », déclara N.O.I.S.E.T. en analysant les données sur un mur. « La prochaine phase du plan requiert une nouvelle sortie nocturne. Il nous faut un alibi infaillible. »

« Un alibi ? », répondit Léo, épuisé. « Mes parents me croient perturbé à cause de leurs ‘disputes’. Si je me fais encore surprendre, ils vont m’enfermer et jeter la clé ! »

« Précisément. C’est pourquoi nous allons déployer une contre-mesure de diversion de niveau supérieur. » D’un compartiment secret, N.O.I.S.E.T. sortit un petit disque métallique qui brillait d’une lumière douce. « Je vous présente le ‘Leurre 3000’. Un projecteur holographique de pointe capable de générer un double parfait de vous-même. »

Léo écarquilla les yeux. « Un hologramme ? Comme dans les films ? »

N.O.I.S.E.T. posa le disque sur l’oreiller de Léo. « Mieux. Il simule les signes vitaux, le cycle de sommeil, et même des ronflements aléatoires. Totalement indétectable pour le capteur parental non-équipé. »

Le robot-lutin appuya sur un bouton. Le disque vrombit et projeta une image de Léo, endormi sous sa couette. C’était stupéfiant de réalisme. Léo s’approcha, fasciné. Puis, l’hologramme grésilla. Son bras droit se détacha de son corps et flotta à dix centimètres au-dessus du lit avant de se remettre en place avec un glitch visuel. Puis, sa tête se tourna à 180 degrés et lui fit un clin d’œil.

« Euh… N.O.I.S.E.T. ? C’est normal, ça ? » demanda Léo, reculant d’un pas.

« C’est une version bêta », rétorqua N.O.I.S.E.T., tapotant frénétiquement le projecteur. « Quelques bugs mineurs de calibrage. Rien d’alarmant. Il devrait se stabiliser. En théorie. Je resterai ici pour surveiller le système pendant votre mission. »

Malgré ses doutes, Léo n’avait pas le choix. La nuit venue, il se prépara. Le plan était de placer une charge à résonance sur l’une des poutres de soutien de la tour. Pas assez pour la détruire, mais assez pour la fragiliser avant l’assaut final.

« Tu es sûr que ça va tenir ? », demanda Léo, jetant un dernier regard inquiet à son double holographique qui semblait maintenant rêver en morse avec des clignotements rapides.
« La probabilité de défaillance catastrophique est inférieure à 12%. Bonne chance, Agent Léo. »

Léo soupira et s’élança par la fenêtre sur son snowboard ionique. Il laissa N.O.I.S.E.T. aux commandes de son alibi numérique et fila vers la tour. L’air froid de la nuit lui piquait le visage, mais la concentration effaçait la peur. Il arriva à la base de la tour, se cachant dans l’ombre d’un contrefort gothique.

Il repéra la poutre métallique identifiée lors de sa reconnaissance. Deux Casse-Noisettes patrouillaient sur le parvis. Il attendit qu’ils s’éloignent, leur souffle formant des nuages blancs dans la nuit. C’était maintenant ou jamais.

Glissant hors de sa cachette, il se précipita vers la poutre. Il sortit de son sac la ‘Vibro-Charge’, un appareil en forme d’étoile de Noël qui s’accrocha magnétiquement au métal. Il tapa une séquence rapide sur son clavier intégré.

BIP BIP BIP… BEEP. La charge était amorcée.

Soudain, une voix rauque résonna derrière lui. « Hé ! Qu’est-ce que vous faites là ? »

L’un des gardes l’avait vu. Léo n’attendit pas pour réfléchir. Il donna une impulsion à ses propulseurs et fila le long du mur de la tour, son snowboard crissant contre la pierre. Il sauta par-dessus une grille, atterrit sur une place déserte et accéléra, disparaissant dans le labyrinthe des rues avant que les gardes n’aient eu le temps de donner l’alerte.

Il rentra dans sa chambre, le cœur battant, juste avant les premières lueurs de l’aube. L’hologramme était toujours là, mais il s’était figé dans une pose de yoga improbable, un pied derrière la tête. Léo le désactiva en secouant la tête, partagé entre l’effroi et l’amusement. Il avait réussi. La première fissure venait d’apparaître dans la forteresse du Dr. Givre.