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Phébus et la Pierre qui Chante

Il était une fois, dans un pays où les nuages avaient un goût de barbe à papa, un tout petit fantôme nommé Phébus. Phébus était transparent comme une bulle de savon et pouvait flotter à travers les murs, ce qui est très pratique. Mais il avait un secret un peu embarrassant : il avait une peur bleue du noir. Dès que le soleil se couchait, Phébus frissonnait de la tête aux pieds immatériels et se cachait dans le creux de son arbre. Et son arbre n’était pas n’importe quel arbre. Phébus vivait au cœur de la Forêt des Brocolis Géants, un endroit merveilleux où les arbres ressemblaient à d’énormes légumes verts et où l’air sentait toujours un peu la soupe.

Chaque soir, c’était la même histoire. Les ombres s’allongeaient entre les troncs-brocolis, et le cœur de Phébus faisait “BOUM-BOUM-BOUM” si fort qu’il faisait trembler les petites fleurettes duveteuses des branches. Un soir, alors qu’il grelottait plus que jamais, le vent lui apporta une vieille légende. On racontait qu’au plus profond de la forêt se cachait la Pierre qui Chante, un caillou magique qui se mettait à briller d’une douce lumière dès qu’on lui chantait une chanson. Pour un fantôme qui détestait l’obscurité, c’était la plus belle nouvelle du monde ! Sans plus attendre, Phébus prit son courage à deux mains (invisibles) et s’envola hors de son logis.

Le voyage fut plus difficile qu’il ne l’imaginait. Plus il s’enfonçait dans la forêt, plus les branches des brocolis géants étaient serrées, créant une pénombre inquiétante. Soudain, il arriva dans une petite clairière. Au centre, posé sur un lit de mousse, se trouvait un caillou gris et parfaitement ordinaire. C’était elle ! Excité, Phébus se mit à chanter. Mais comme il avait très peur, il chanta une chanson très rapide et un peu fausse : « La-la-li-lumière-viens-viite-j’ai-peur ! » Le caillou clignota une seule fois, d’une lueur aussi faible qu’une luciole fatiguée, puis s’éteignit.

« Oh non ! » gémit Phébus. Alors, il essaya de chanter plus fort, en tapant du pied (ce qui ne faisait aucun bruit). « ALLEZ, STUPIDE CAILLOU, ALLUME-TOI ! » Mais la pierre resta désespérément grise. Déçu et effrayé, Phébus s’assit sur une racine et se sentit tout petit. C’est alors qu’il entendit un grignotement discret. Une minuscule chenille verte, occupée à mâchouiller une feuille de brocoli, le regardait de ses petits yeux ronds.

« Tu fais beaucoup de bruit, toi », dit la chenille d’une voix douce.
« C’est ce caillou qui ne veut pas marcher ! » se plaignit Phébus. « La légende a menti ! »
« Hmm », fit la chenille en avalant sa bouchée. « Pour me transformer en papillon, je dois attendre des jours et des jours dans mon cocon. Je ne peux pas crier pour que ça aille plus vite. Parfois, les plus belles choses demandent juste un peu de patience. »

Phébus regarda la petite chenille, puis le caillou. La patience… Il n’y avait pas pensé. Il avait voulu de la lumière tout de suite, sans attendre. Il respira un grand coup, ferma les yeux et essaya une autre approche. Il se remémora une vieille berceuse que sa maman fantôme lui chantait autrefois. Tout doucement, d’une voix calme et posée, il commença à fredonner. Il chanta la rosée du matin, le vol lent d’un bourdon et le parfum des fleurs. Au début, rien ne se passa. Mais Phébus continua, patiemment. Et là, magie ! Une lueur dorée commença à naître au cœur du caillou. Plus sa chanson était douce et lente, plus la lumière grandissait, jusqu’à devenir une lueur chaude et rassurante qui illumina toute la clairière.

Phébus avait compris. Ce n’était pas la chanson qui comptait, mais la patience qu’on mettait dedans. Il remercia la petite chenille d’un signe de tête et ramassa son précieux trésor.

Le chemin du retour fut une promenade de plaisir. Le caillou dans sa main invisible éclairait son passage, transformant les ombres effrayantes en silhouettes amusantes. De retour dans son arbre-brocoli, il posa la pierre sur sa table de nuit. Son logis n’était plus jamais plongé dans le noir complet. Il était rempli d’une lumière douce, la lumière de la patience. Phébus était toujours un fantôme, mais il n’était plus le fantôme qui avait peur du noir. Il était Phébus, le fantôme qui faisait chanter la lumière.