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Dehors, la tempête de neige soufflait comme un grand loup blanc. Les flocons dansaient une valse folle contre la fenêtre de la chambre de Léo. Mais à l’intérieur, bien au chaud, un petit drame se jouait sur une étagère.
Milo, un adorable pantin de bois aux articulations qui cliquettent doucement, était très inquiet. Il fouillait encore et encore les minuscules poches de son veston en feutre rouge. Vide. Toujours vide. Sa liste, sa précieuse liste, avait disparu ! Depuis qu’il était un jouet, il notait tout sur ce minuscule rouleau de papier. Sans elle, il se sentait incomplet, comme un puzzle auquel il manquerait la pièce du milieu.
Soudain, un tintement cristallin, fragile comme une clochette de glace, se fit entendre près de la fenêtre. Milo plissa ses yeux peints. Une petite créature pas plus haute que son pouce, toute faite de givre scintillant et de lumière bleutée, était assise sur le rebord, tremblant de tous ses membres. Elle ressemblait à un flocon de neige mais avec deux grands yeux tristes.
« Bonjour… » murmura Milo en s’approchant avec précaution.
« B-b-bonjour… » répondit la créature d’une petite voix qui grelottait. « Je… je suis un Grelotton. Et je suis très malheureux. »
Le cœur de bois de Milo se serra. Oubliant sa propre angoisse, il s’assit à côté de l’être de glace. « Pourquoi es-tu si triste, petit Grelotton ? Et pourquoi trembles-tu alors que tu es fait de froid ? »
Le Grelotton renifla, ce qui produisit une minuscule stalactite au bout de son nez pointu. « C’est un froid de rancune, expliqua-t-il. Je me suis disputé avec le Vent du Nord. Il m’a bousculé sans s’excuser et m’a fait tomber de mon nuage ! Je lui en veux tellement que ce mauvais sentiment me gèle de l’intérieur. C’est un froid qui ne réchauffe pas, c’est un froid qui fait mal. »
En entendant le mot “rancune”, Milo eut un déclic. Il comprit soudain ce qu’il y avait sur sa fameuse liste perdue.
« Je crois que je te comprends, » dit-il doucement. « Ma liste… c’était ma liste des choses à pardonner. »
Le Grelotton le regarda, intrigué.
« Oui, » continua Milo. « J’y avais noté la fois où le chat a mâchouillé mon chapeau, le jour où Léo m’a oublié sous la pluie et où ma peinture a un peu coulé, ou encore la fois où la poupée Clotilde a dit que mon veston rouge était démodé. Je gardais cette liste pour ne pas oublier que je devais leur pardonner un jour… mais je ne le faisais jamais. Je ne faisais que la relire, et ça me rendait lourd et triste. »
Le Grelotton cessa de trembler un instant. Il écoutait attentivement.
« Pardonner, » dit Milo en le regardant avec tendresse, « c’est comme laisser fondre un glaçon que tu tiens serré dans ton cœur. Au début, c’est désagréable, mais après, ton cœur est libre et tout chaud. Peut-être que le Vent du Nord était juste très pressé et qu’il ne t’a pas vu ? »
Le Grelotton réfléchit. L’idée était nouvelle. Lui en vouloir le rendait triste et le faisait fondre de chagrin. Et si… et si Milo avait raison ?
Il ferma ses yeux brillants et murmura dans un souffle glacé : « D’accord… Je… je pardonne au Vent du Nord d’avoir été si pressé. »
À l’instant même où il prononça ces mots, une merveilleuse magie opéra. Une douce lumière dorée commença à émaner du Grelotton, chassant le bleu glacial de la tristesse. Il ne tremblait plus. Au contraire, il flottait légèrement, rayonnant de bonheur.
Au même instant, Milo sentit une chaleur inconnue se répandre dans sa poitrine de bois. Une petite étoile de givre magique, brillante et permanente, apparut sur son veston rouge, juste à l’endroit de son cœur. Il comprit alors. En aidant le Grelotton à pardonner, il avait lui-même pardonné tout ce qui était sur sa liste. Il n’en avait plus besoin ! Perdre ce bout de papier était la meilleure chose qui lui soit arrivée.
« Merci, Milo ! » tintinnabula le Grelotton, qui n’était plus un Grelotton mais un Flocon de Joie. « Tu m’as appris le secret pour briller ! »
Il fit une pirouette joyeuse dans les airs, laissant une traînée de poussière d’étoiles, puis fila par la fenêtre pour rejoindre la danse de la neige, le cœur léger.
Milo resta sur l’étagère, touchant la petite étoile de givre sur son cœur. Il se sentait plus léger et plus heureux que jamais. Il comprit que sa vraie magie ne venait pas d’une liste, mais de la place qu’on fait dans son cœur quand on laisse partir les petites tristesses. Dehors, la tempête semblait s’être calmée, comme si le Vent du Nord, lui aussi, se sentait pardonné.

